“Pour les plus riches ou pour les plus pauvres.” C’est une promesse que de nombreux couples font dans le cadre de leurs vœux de mariage. L’idée est que le couple s’engage à rester ensemble pendant les bons moments quand ils ont beaucoup et les mauvais moments quand ils ont peu.
Les Américains sont fiers de vivre dans une société sans classes dans laquelle chacun peut améliorer son sort grâce à la détermination et au travail acharné. Selon les psychologues de l’Université du Nord-Ouest Lydia Emery et Eli Finkel, cependant, cette notion ne reflète plus la réalité dans l’Amérique du XXIe siècle. Au lieu de cela, le pays s’est divisé en deux classes, les « nantis » et les « démunis », avec très peu de mouvements ascendants ou descendants entre eux.
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Les nantis et les démunis
Les nantis sont généralement diplômés de l’université et leurs emplois sont raisonnablement sûrs. Ils ont non seulement un revenu suffisant pour répondre à leurs besoins, mais ils ont également un revenu disponible pour poursuivre leurs loisirs.
En revanche, les démunis atteignent généralement tout au plus un diplôme d’études secondaires ou professionnelles et sont confrontés à une insécurité d’emploi constante. Ils arrivent à peine à joindre les deux bouts avec les salaires qu’ils rapportent à la maison, et ils ne sont toujours qu’à une petite crise de la ruine financière.
Selon Emery et Finkel, la classe sociale a également un impact sur votre vie de bien d’autres manières, y compris votre bonheur, votre santé et même vos relations intimes. Par exemple, les couples de statut socio-économique inférieur sont moins susceptibles de se marier et plus susceptibles de divorcer que leurs homologues de statut socioéconomique plus élevé. De plus, ceux qui restent ensemble connaissent plus de problèmes dans leur mariage et en sont moins satisfaits.
Néanmoins, les riches et les pauvres veulent les mêmes choses du mariage, en particulier un partenaire digne de confiance pour une compagnie agréable et une intimité émotionnelle. Alors pourquoi les couples à faible SSE rencontrent-ils plus de problèmes relationnels que les couples à SSE élevé ? Emery et Finkel soutiennent que c’est parce que SES ne se limite pas à combien d’argent vous gagnez ; il s’agit aussi du type de culture dans laquelle vous vivez.
SES et Culture
Les pensées et les comportements des membres de la classe économique inférieure sont façonnés par une culture d’« interdépendance dure ». La culture est « dure » car la vie est pleine de dangers et les gens doivent être constamment à l’affût des menaces.
Mais c’est aussi « interdépendant », parce que ces gens ont appris qu’ils ne peuvent survivre que s’ils se serrent les coudes et s’entraident. Les couples de faible SSE ont tendance à se soutenir mutuellement, mais ils craignent également d’être exploités.
En revanche, ceux qui habitent la classe économique supérieure connaissent une culture d’« indépendance expressive ». Parce que leurs besoins fondamentaux sont satisfaits, ils ont tendance à se concentrer davantage sur les besoins d’épanouissement personnel, tels que les passe-temps et les objectifs de carrière, qui visent à exprimer ses aspirations.
La culture est également « indépendante », dans la mesure où la pensée est beaucoup plus individualiste et les comportements sont davantage orientés vers la mise en valeur de la personnalité unique. Étant donné que ces personnes se sentent plus en sécurité dans leur propre situation, elles ont tendance à considérer les relations intimes comme une occasion de s’ouvrir et de se connecter émotionnellement avec un partenaire.
Connexion personnelle ou autoprotection ?
Les relations intimes sont difficiles quel que soit le SSE, dans la mesure où nous devons tous équilibrer les avantages d’une relation personnelle étroite avec le danger d’être exploité par un partenaire. Emery et Finkel proposent que cet équilibre penche dans une direction différente selon SES. Ceux qui vivent dans la culture « dur interdépendante » de faible SSE comprennent certainement la nécessité de se soutenir les uns les autres en cas de besoin, mais en même temps, ils doivent se garder d’être exploités. En revanche, ceux qui appartiennent à la culture « expressive indépendante » de SSE élevé sont plus en sécurité dans leur situation et considèrent qu’un lien intime profond avec un partenaire romantique est particulièrement important dans leur vie largement indépendante et individualiste.
Des études menées par Emery et Finkel montrent que lorsque les gens se soucient de leur autoprotection, ils se sentent moins satisfaits de leurs relations intimes. De plus, les personnes de faible SSE sont plus susceptibles de privilégier l’autoprotection plutôt que les liens personnels profonds. Selon les chercheurs, c’est ce qui explique les moins bons résultats relationnels des couples à faible SSE.
Les riches et les pauvres font face à des problèmes différents
L’un des objectifs de la psychologie est de trouver des moyens d’améliorer la qualité de la vie humaine. Au cours des dernières décennies, nous avons beaucoup appris sur la dynamique des relations intimes et les processus qui mènent à des résultats heureux ou malheureux. Notre compréhension de la façon d’aider les couples à surmonter leurs problèmes et à atteindre des relations satisfaisantes a considérablement augmenté.
Et pourtant, lorsque les meilleures pratiques de conseil sont appliquées aux couples à faible SSE, elles échouent presque toujours. La raison en est que presque toutes les recherches en science des relations ont été menées sur des couples à SSE élevé, qui font face à un ensemble de problèmes différent de celui de leurs homologues à faible SSE.
Le counseling pour les couples à SSE élevé se concentre sur les compétences en communication et le renforcement de l’empathie, mais ce ne sont pas les problèmes auxquels les couples à SSE faible sont confrontés. Ayant grandi dans une culture hautement interdépendante, ils sont déjà assez compétents dans ce domaine. Au contraire, ils ont surtout besoin d’aide pour stabiliser leur situation financière. Tant que leurs besoins fondamentaux ne sont pas satisfaits, les gens ne peuvent tout simplement pas se concentrer sur le besoin psychologique plus élevé d’une connexion intime et profonde avec un partenaire de vie.
En fin de compte, Emery et Finkel semblent soutenir que les problèmes des « riches » ne sont pas les mêmes que les problèmes des « pauvres », et les psychologues devraient cesser de supposer qu’ils le sont. Au lieu de cela, les chercheurs doivent étendre la portée de la science des relations pour inclure davantage d’études sur les minorités et les défavorisés. Ce n’est qu’alors que nous aurons un portrait complet de l’expérience humaine.